Il y a trois ans, sur « La vie est belle quand le monde est bio ! « a été diffusée l’interview qu’a eu la gentillesse de m’accorder Christophe qui, bien qu’ayant été diagnostiqué séropositif, a décidé de vivre sans traitement.
Je ne vous cache pas que je n’ai pas publié cet article comme les autres… ; celui-ci revêtait une signification encore plus spéciale à mes yeux puisque naturellement, j’avais été très touchée par la sincérité avec laquelle Christophe s’est ouvert à moi, n’éludant aucune question, mettant tout en œuvre afin de livrer un témoignage aussi objectif que possible, c’est à dire basé essentiellement sur son vécu, sur sa propre approche, sans verser pour autant dans une forme de « gourounisation » à laquelle beaucoup de personnes seraient tentées. J’ai particulièrement apprécié le fait que s’il incite à quelque chose, ce n’est pas à le croire sur parole ni à se contenter de son propre récit. Non. Son message est, somme toute, très simple : « Ne faites confiance qu’à vous-même, votre corps, votre vie vous appartiennent et vous avez le devoir de vous informer, de questionner, de remettre en cause, de multiplier les approches, les points de vue ».
Un commentateur pour le moins culpabilisant évoquait la responsabilité de Christophe, arguant du fait que des témoignages tels que le sien ou celui de tant d’autres en somme…. pouvaient inciter d’autres personnes à en faire autant et, de cette manière, se mettre en danger. Un autre, sur les réseaux sociaux, évoquait avec un certain cynisme le fait que Christophe devait bien être un peu « nouille » pour avoir tant confiance en ces professionnels de la santé vers lesquels, aussitôt après le diagnostic, il avait été dirigé… pour être pris en charge, bichonné, rassuré et infantilisé, traité.
Ces deux commentaires, d’une certaine manière, illustrent parfaitement la problématique dont il est question, celle de la responsabilité. Il en va d’une certaine manière de même pour la responsabilité que la liberté : vous savez, « Elle commence là où s’arrête celle de l’autre ».
Parce qu’en ce qui me concerne, je suis convaincue que la responsabilité, sans l’ombre d’un doute, revient tout d’abord et essentiellement au corps médical, auquel se fient avec une confiance parfois aveugle, beaucoup de personnes qui, dès lors qu’elles sont malades, se trouvent d’autant plus en détresse, fragilisées, vulnérables.
The Black Sheep, William Wallace Denswlow
Lorsque l’on considère le poids, aussi bien moral que financier, de l’arsenal médical, scientifique et pharmaceutique… il serait difficile, déplacé et cruel de jeter la pierre à toute personne accordant de la sorte sa confiance en leurs représentants. Pour autant, ne versons pas dans une quelconque forme d’extrémisme, ce que j’ai en horreur, profondément. Parce que je pense que tout médecin n’est pas consciemment complice de cet état de faits et que beaucoup d’entre eux sont d’autant plus convaincants qu’ils sont convaincus ; c’est à dire sincèrement animés par l’idée de « bien faire », par une volonté de soigner le patient, voire de le guérir, à l’aide d’une médecine en laquelle ils ont foi, profondément.
Ensuite, pour évoquer la responsabilité du malade, c’est à dire celle de l’individu, de l’être humain avant toute chose, elle n’est pas aisée à conquérir… cette liberté. Il faut l’admettre, et ne nous mentons pas : nous ne sommes pas particulièrement élevés, éduqués, formatés… selon cette perspective de liberté. La liberté de penser, de questionner, de remettre en cause, parfois de rejeter, de contredire, de s’opposer.
Beaucoup de personnes en viennent à oublier qu’elles sont libres, ou, pour être plus précise, croyant être dotées d’une forme de liberté, elles ne s’aperçoivent pas qu’elles ne sont libres qu’en s’agitant comme des singes sous le poids de leurs chaînes, tentant de se frayer un passage… dans ce qu’elles ne perçoivent pas comme étant une cage. Toutes habituées et « programmées » à ne s’en remettre toujours qu’à des instances supérieures (une institution, un maître à penser, un gourou, un spécialiste…), à se nourrir aussi bien physiquement que spirituellement d’une matière « préparée », déjà conditionnée, prémâchée, elles en ont perdu ce simple bon sens qui, avant de prétendre obtenir des réponses ou des clés, consisterait dans un premier temps à juste s’interroger ! Et puis, il y a la paresse aussi, cette torpeur intellectuelle à laquelle s’abandonnent les gens lorsqu’ils ne se sentent pas suffisamment d’attaque pour fournir un (sur)effort et qui les fait s’étendre progressivement pour que sur leur dos s’opère… un festin.
La première chaîne et sans aucun doute la plus coriace, la plus difficile à briser, est avant toute chose celle que nous construisons, jour après jour, sous la chape d’un système (social, médical etc) rendu volontairement opaque et hermétique, avec le béton de nos carcans, la super glue de notre ignorance et l’étoffe de nos petites lâchetés.
J’en viens donc au cœur de cet article, c’est à dire à l’hommage que j’ai envie de rendre ici à toutes celles et tous ceux qui, dans des registres différents, ont puisé en eux la force de faire face à un diagnostic souvent éprouvant sur le moment, vécu parfois comme un véritable cataclysme… et le courage d’entreprendre des traitements souvent très lourds et accablants… de se confronter à la peur, à la solitude dans laquelle plonge la maladie, à la souffrance. Qu’elles aient recours à des traitements conventionnels par choix ou par ignorance, ou qu’elles décident de se tourner vers d’autres voies thérapeutiques, il n’en demeure pas moins que toute personne touchée par la maladie voit son existence revêtir une dimension et une intensité nouvelles. Il y a toujours quelque chose d’héroïque et de surhumain à travers tout itinéraire que la maladie a frappé de son sceau.
Ce qui me touche, ce sont également les personnes qui ont réappris à s’informer, à se poser les bonnes questions, à remettre en cause des certitudes qui, le plus souvent, pouvaient être des bouées de sauvetage et de parachute d’autant plus précieuses que la maladie renvoie inéluctablement et cruellement les êtres à leur extrême vulnérabilité, leur mortalité, à leur besoin de s’ancrer un maximum dans un paradigme rassurant et solide.
Je songe notamment à toutes ces personnes dont j’ai découvert les témoignages, les récits, à travers mes recherches sur internet, ou encore par le biais des réseaux sociaux. Pour continuer à évoquer le sida en particulier, je ne peux m’empêcher de mentionner ici David Crowe par exemple qui, au prix d’un important travail de recherches, de documentation, de diffusion et de partage, permet à des gens du monde entier de raconter sur le site « living without hiv drugs » leur expérience, c’est à dire leur vie de séropositifs sans traitement, leur cheminement, leurs propres remèdes alternatifs.
Mention doit également être faite de tous ces sites, qu’ils soient en français ou en anglais (comme le plus connu d’entre eux, Rethinking Aids, du même nom qu’un groupe présent sur Facebook qui rassemble plusieurs milliers de personnes ayant fait le même choix consistant à vivre sans traitement et partageant toutes leurs infos), qui se sont avérés pour moi autant de sources et de ressources précieuses lorsque j’ai mené mon enquête afin de pouvoir mieux cerner (et accueillir) le témoignage de Christophe.
Et puisque l’on évoque ici tous ces gens, pour la plupart des anonymes, qui mettent tout en œuvre, qui soulèvent des montagnes dans le seul objectif de partager leur expérience, de relayer, de transmettre et de diffuser au maximum les informations dont ils ont pris connaissance, les différentes avancées en la matière………… j’ai envie d’évoquer une personne rencontrée il y a plusieurs années par l’intermédiaire du réseau social Facebook.
Je tairai son nom afin de ne pas l’embarrasser mais n’hésitez pas à effectuer une recherche pertinente sur Facebook, et vous trouverez le groupe qu’elle a créé puisqu’il s’est imposé comme la référence francophone en la matière ! Appelons-la… A.
A., en vraie romantique des temps modernes, après que son compagnon ait été diagnostiqué séropositif, a remué ciel et terre afin de s’informer, afin de mieux comprendre la pathologie dont il était question… afin de protéger envers et contre tout (et tous) l’homme qui partage sa vie et qui, aussitôt après le diagnostic, a été pris en charge médicalement. Au sujet de la trithérapie, faisant appel à son seul bon sens, elle évoque notamment le fait que « JAMAIS il ne faut croire que ces « médicaments » TUEURS ne sont pas sans répercussions néfastes . Ça vous ronge les reins et le foie et le sang et les organes, jusqu’à votre état psychologique et psychique ainsi que le mental et les fonctions nerveuses… jusque dans votre conscience . ».
Partant de ce simple postulat, animé de la franche détermination à sauver « son homme » comme elle l’appelle, elle a multiplié les investigations, les lectures, les analyses. Et puis un jour, apprenant que miraculeusement, un homme atteint du virus du sida avait pu « guérir » suite à une greffe de moelle osseuse, elle n’a pas hésité à subir une ponction afin de savoir si oui ou non, elle pouvait être compatible et, ainsi, sauver son compagnon. C’est à ce moment-là qu’A. croise, par le biais des réseaux sociaux, un homme qui, en lui permettant d’accéder à un florilège d’informations, lui indique une autre voie, d’autres possibles… A son tour, A. décide de diffuser, de recueillir un maximum d’expériences, de jeter des passerelles entre les gens, les histoires avec pour objectif : sa quête de vérité… combinée à celle qui anime de multiples autres.
Constatant qu’en France, il n’existait sur les réseaux sociaux absolument aucun groupe français rassemblant les personnes séropositives sans traitement, elle décide de créer le tout premier. Ce sont des milliers de personnes qui ont pu rejoindre le groupe, de manière ponctuelle ou non, trouvant ici des témoignages, des ressources, des pistes. Toujours une écoute.
Quant au compagnon d’A., il a choisi de faire confiance à sa compagne, d’interrompre tout traitement conventionnel et de faire appel à une médecine 100% naturelle… qui lui permet d’être à ce jour en excellente santé.
Je dédie cet article à tous ces êtres qui, dans l’ombre, dans l’anonymat le plus absolu, œuvrent conformément à leurs choix et à leur axe, animé d’une motivation sincère et désintéressée qui les amène à disséminer çà et là de précieuses informations, autant de pépites, ou de graines, appelées à éclore, à faire mûrir les idées autant que les réflexions, et à éclairer le chemin de chacun, que les yeux soient disposés à s’ouvrir ou non. Ainsi qu’à l’être que j’ai eu la chance de rencontrer sur fond de quête de vérité (jamais de hasard ;-)…) et qui, à son humble niveau, ne cesse de semer ses précieuses petites graines porteuses du Vivant.
En guise de conclusion… J’ai été informée que l’interview que Christophe m’a offerte a pu « faire le buzz », notamment en étant relayée par les sites d’information Egalité & Réconciliation ou encore Quenel+ : je remercie avec tout mon cœur les personnes qui ont permis à ce témoignage d’être lu par plusieurs dizaines de milliers d’autres. Pour une blogueuse, c’est juste énorme ! Mais pour toutes ces personnes que mon article représente, c’est au-delà… cela n’a pas de prix ! Parce que c’est une petite pierre apportée à leur édifice, quelques forces jointes à leur propre combat, et lorsqu’il y a un buzz tel que celui-ci, c’est à eux qu’il s’agit de le dédier car sans leur courage, sans leur propre gnac… et sans celle des lecteurs qui souhaitent à leur tour transmettre, partager, faire buzzer… rien, aucune avancée, aucune prise de conscience, aucune mise en lumière ne serait jamais possible.
Merci à toutes celles et tous ceux qui se battent pour que nos esprits soient éclairés.
Je suis « séropositif » moi-même depuis 11 ans et ai décidé d’un commun accord avec mon compagnon (qui ne m’a pas quitté pour autant et qui n’est pas séropositif malgré une vie sexuelle active!) il y a six ans de cesser le traitement. Je suis tombé sur votre autre article au sujet de Christophe, un seul mot: merci. Vous nous appelez « formidables » parce que nous avons le courage de nos opinions et convictions, mais je vous le retourne, vous aussi vous l’etes, formidable, auteur de cet article.
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Content de te retrouver ! Tant qu’il y aura des gens comme toi, les gens comme nous auront une belle raison d’ouvrir leur gueule.
Zaz. « Séropositif » depuis 8 ans. Pas de tri depuis 6 ans. Alimentation bio, sport, une compagne séronégative et un petit bout de 4 ans séronégatif. No comment. Si tu as besoin de témoignage preuve à l’appui, je suis partant. 6 ans de recul. Et sinon….. content que tu aies décidé de reprendre ton blog. Tu m’as aidé comme personne.
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ALLEZ VISITER SIDASANTE.COM !
MARK GRIFFITHS !
http://www.sidasante.com/temoigna/temmarkg.htm
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Bonsoir, je suis séropositif depuis un an et j’ai besoin de votre aide. MP ! Vous m’avez redonnée l’espoir
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Merci pour tous ces temoignages
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